Michel Menu est né dans le petit village de Secondigny, dans les Deux-Sèvres, à quinze kilomètres à l'ouest de Parthenay. Issu d'une famille modeste, son père travaillait aux Chemins de fer de l'Ouest et avait participé à la Grande Guerre, tandis que sa mère était couturière. Il avait un frère cadet, Jean, né après la Première Guerre mondiale.
C'est à Châtellerault que Menu découvre le scoutisme, au sein de la 1re Châtellerault, troupe qui a également vu passer Pierre-Louis Gérin et Jean-Pierre Alouis.
Il prononce sa promesse scoute en 1931, à l'âge de 15 ans. Son engagement dans le scoutisme se poursuit avec la création de la troupe 1re Thouars. Pendant son adolescence, Menu est fortement influencé par les cadets du P. Doncoeur, alors qu'il est routier-scout à la troupe Richemont de Vannes.
Brillant étudiant, Menu poursuit des études de droit et de lettres, tout en s'intéressant aux matières scientifiques. Attiré par la carrière militaire, il suit une préparation militaire supérieure en 1938-1939, puis intègre la formation des élèves-officiers de réserve l'année suivante à l'École militaire de l'artillerie de Poitiers. C'est dans ce contexte qu'il participe à la création d'un clan de routiers-scouts pour les élèves officiers, une pratique alors courante dans de nombreuses écoles militaires de l'époque.
Ces années de formation forgent le caractère de Menu et jettent les bases de sa future carrière dans le scoutisme. Elles témoignent déjà de sa capacité à allier engagement scout et formation militaire, une combinaison qui marquera profondément sa vision du scoutisme dans les années à venir.
Au début de l'année 1940, Michel Menu, fraîchement promu aspirant, est affecté au 29e régiment d'artillerie divisionnaire. Lors de l'attaque allemande, il combat en Belgique, puis participe à la dure bataille de la poche de Lille du 25 au 30 mai 1940. Le 31 mai, il est fait prisonnier à Lambersart.
Menu démontre rapidement sa détermination et son courage. Emprisonné à Hammerstein (aujourd'hui Czarne, en Pologne), il s'évade à la fin de l'année 1940, mais est repris et envoyé à Königsberg. Après une deuxième tentative d'évasion au printemps 1941, c'est finalement sa troisième tentative, à l'hiver 1941, qui est couronnée de succès. Après un périple de 2000 kilomètres à travers l'Europe occupée, il regagne la France en décembre 1941.
De retour en France, Menu rejoint la Résistance à partir de mars 1942. Sa position officielle au quartier général des Scouts de France lui sert de couverture idéale. En 1943, promu lieutenant par Londres, il intègre le réseau "Action R3" du BCRA sous le pseudonyme de Paul Beaulieu. Il participe à l'organisation de parachutages clandestins et dirige deux missions cruciales : la mise en place d'un atelier de faux papiers et la conduite d'une filière d'évasion de prisonniers.
Après le débarquement, Menu, promu capitaine, rejoint le maquis du commandant Raymond Mary-Basset et participe à la libération de Lyon. Il est ensuite impliqué dans la création d'une école de cadres pour officiers subalternes et sous-officiers à Saint-Genis-Laval.
En 1946, Michel Menu est démobilisé et retrouve sa famille. C'est à ce moment que le scoutisme le rappelle. Sur proposition des P. Doncoeur et Forestier, Menu est nommé à la tête de la branche éclaireur des Scouts de France. À 30 ans, scout expérimenté, officier et résistant décoré, jeune père de famille, Menu apparaît comme le candidat idéal pour revitaliser le scoutisme d'après-guerre.
Dès sa prise de fonction, Menu imprime sa marque. Dans le numéro de janvier 1947 de la revue Scout, il est présenté ainsi : "C'est un gars qui n'a peur de rien. Un ancien patrouillard de Pierre-Louis Gérin, à Châtellerault. C'est tout dire. Prisonnier, il s'est évadé après cent aventures au poil (...). Il a été parachutiste. [...] Chic, avec lui à la branche, on vivra des aventures."
Menu lance alors le concept des "raiders scouts". Cette nouvelle approche vise à garder les "garçons de 15 ans" dans le mouvement en leur proposant des activités plus adaptées à leur époque. Le programme des raiders inclut de nouvelles épreuves comme devenir auxiliaire des grands services publics de secours, se former aux techniques et aux sports modernes (judo), connaître les différents milieux dans lesquels les garçons évoluent ou évolueront, et favoriser les contacts internationaux.
Menu définit ainsi la mission des raiders : "C'est tout simplement un corps de secours spécial, préparé par un entraînement sévère, aux missions les plus périlleuses et aux services les plus variés. Leur qualité c'est le courage, leur force c'est l'esprit d'équipe. Apôtres et missionnaires de Dieu, ils le font connaître par leur charité. Serviteurs de la communauté, ils sont enrôlés dans les grands services publics."
Cette nouvelle proposition, lancée officiellement en 1948-1949, rencontre un vif succès auprès des garçons et des chefs. Elle s'accompagne d'une adaptation de l'uniforme et d'une nouvelle "loi" complétant la loi scoute traditionnelle. Menu conçoit ainsi un scoutisme à son image : volontaire, exigeant, toujours prêt.
Même après avoir quitté ses fonctions officielles, Michel Menu continue à suivre de près les évolutions du scoutisme. Dans les années 1960-1970, au plus fort de la crise du scoutisme, il publie plusieurs ouvrages de réflexion sur le système des patrouilles et le rôle des chefs. Parmi ceux-ci, "Le CP et son gang" (1961) et "Arts et techniques du scout-mestre" (1966) sont considérés comme des manuels essentiels, comparables à ceux du R.P. Sevin ou du P. Forestier à leur époque.
Cependant, Menu s'inquiète des réformes entreprises au sein des Scouts de France, notamment l'abandon de l'uniforme traditionnel et du système des patrouilles. En 1965, il participe à la rédaction d'une petite revue "Réflexions de scout-mestres", suivie en 1967 par la revue "Raid" pour les garçons. En 1967, avec Pierre Delsuc, Pierre de Montjamont et Henry Dhavernas, il signe "Bases fondamentales du scoutisme", un court écrit exprimant "la doctrine de base du scoutisme telle que Baden-Powell l'a conçue et que les fondateurs catholiques français l'ont adaptée à notre pays".
Face aux tensions grandissantes au sein du mouvement, Menu finit par se retirer des polémiques. Cependant, toujours passionné par l'éducation et la pédagogie, il continue à publier ses réflexions pendant de nombreuses années.
C'est dans ce contexte que Menu lance une nouvelle aventure : les goums. Inspiré par son expérience de cadet du P. Doncoeur et par les goumiers militaires qu'il avait admirés pendant la guerre, Menu crée en 1969 ces raids de marche pauvre, physique, spirituelle et fraternelle. Un raid goum, c'est "une marche pauvre (pas d'argent, pas de montre, pas de tabac, 1 kg de riz par personne et par jour), physique (8 jours de marche et près de 150 km de moyenne montagne), spirituelle (un prêtre catholique est aumônier) et fraternelle (en « tribus » de 15 à 20 jeunes)". Cette initiative, qui refuse la société de consommation, s'inscrit dans l'air du temps tout en perdurant bien au-delà. En un demi-siècle, plus de quinze mille jeunes ont vécu l'expérience goum.
L'impact de Michel Menu sur le scoutisme français est considérable. Des milliers de jeunes lui doivent "un style, un idéal, une manière d'être". Son dévouement pour les jeunes était total, comme en témoigne son engagement jusqu'à un âge avancé. Menu marchait encore sur le Causse à près de 90 ans, aimant retrouver les jeunes qui lui montraient qu'ici au moins "ça suit!", selon le mot du sous-lieutenant Georges Del qu'il affectionnait particulièrement.
La République a reconnu ses mérites en lui décernant la croix de commandeur dans l'Ordre national du mérite en 1999 pour ses années "d'activités professionnelles, associatives et de services militaires".
Le 25 mars 2012, Menu perd son épouse Madeleine, qui l'avait accompagné depuis le temps de la Résistance. Trois ans plus tard, le 2 mars 2015, à l'âge de 99 ans, il "rejoint le camp du repos et de la joie" selon les termes de la prière des chefs des Scouts de France. Ses obsèques, célébrées le 6 mars en l'église Stella-Maris à Saint-Cloud, rassemblent une foule d'anciens, de scouts et de goumiers. L'homélie est prononcée par Mgr Benoît Rivière, évêque d'Autun et ancien goumier.
L'héritage de Michel Menu reste vivant aujourd'hui. Il existe encore des raiders et des patrouilles libres dans plusieurs mouvements scouts, et des raids goums sont lancés tous les ans, témoignant de la pérennité de son influence sur le scoutisme français.